Il devient impérieux qu’un dialogue serein avec des pistes de solution à la crise, puisse éviter une nouvelle crise institutionnelle, isolant l’Algérie de l’arène internationale et accentuant au niveau interne le divorce Etat-citoyens, avant la fin de l’expiration des dépôts de candidatures, en principe le 20 mai 2019, pour éviter le scénario passé, aucun candidat de poids crédible n’ayant déposé son dossier, et surtout avant l’expiration du mandat du président par intérim actuel c’est-à-dire le 09 juillet 2019. Car après la dernière sortie de la population en masse le 17 mai 2019, il ne fait plus aucun doute, il sera difficile, sinon impossible de tenir l’élection présidentielle le 04 juillet 2019.
Ce d’autant plus que les images diffusées la journée du 16 mai 2019 ont provoqué un véritable choc de rejet par l’opinion publique de l’ancienne classe politique devant l’opinion face à l’ampleur des faits de corruption et de délits d’initiés reprochés aux hauts responsables auditionnées qui demandaient à la population dans un passé récent de serrer la ceinture. La situation politique et économique actuelle en ce mois de la mi- mai 2019 est complexe avec une population qui dépasse 42 millions d’habitants et qu’il faille créer 300.000/350.000 emplois par an qui s ‘ajoutent au taux de chômage actuel afin d’éviter de vives tensions sociales. De grands défis attendent l’Algérie, une entreprise d’envergure devrait tourner autour de dix (10) axes directeurs.
Premièrement, il y a urgence de trouver des solutions rapides à la crise politique, évitant de s’enfermer dans un juridisme étroit. Du 22 février au 18 mai 2019, les manifestations au lieu de diminuer s’amplifient, devant tirer les leçons rapidement, la rencontre initiée par l’actuel chef d’Etat du 22 avril 2019 invitant partis politiques, personnalités et sociétés civiles ayant eu un résultat très mitigé, du fait de la non représentativité des personnes et des partis à cette rencontre. La majorité de la population des 48 wilayas, rejette l’actuel chef d’Etat, l’actuel premier ministre et les composantes de l’actuel gouvernement où des ministres ont été hués lors de récents déplacements, montrant la confiance brisée avec les actuelles institutions, étant dans une impasse politique, nuisible à l’image de l’Algérie tant au niveau national qu’international.
Deuxièmement, il est illusoire, voire utopique de prévoir l’élection présidentielle pour le 04 juillet 2019 où on assiste déjà à une désobéissance civile tant des présidents d’APC que des magistrats dans bon nombre de wilayas, avec le risque d’un boycott massif ne résolvant en aucune manière la crise qui est avant tout politique, au contraire avec le risque de l’amplifier. L’élection présidentielle doit se tenir rapidement, impérativement avant la fin de l’année, le 04 juillet 2019 étant une impossibilité politique et technique avec les mêmes institutions du passé qui ont favorisé la fraude massive, quitte à accroitre encore plus les tensions avec un taux d’abstention record et isoler l’Algérie de l’arène. Internationale.
Troisièmement, il est irraisonnable, le temps ne se rattrapant jamais en économie, de demander une transition qui traine en longueur de plus d’une année, avec le risque d’une paralysie économique et sociale avec le risque d’aller au FMI avec la perte de l’indépendance politique et économique et le risque de tensions sociales aigues. Deux solutions se présentent pour une période ne devant pas dépasser six mois : soit activer le conseil de sécurité qui nommerait une présidentielle collégiale autour de personnalités consensuelles, ne devant pas dépasser trois personnes, soit que l’actuel président par intérim nomme une personnalité consensuelle comme président du conseil constitutionnel qui le remplacerait après sa démission, et dans la foulée un gouvernement neutre « de compétences nationales».
Quatrièmement, il est utopique de demander à plus de 20 millions d’algériens des représentants traversés par des courants idéologiques contradictoires :comment concilier les ultra gauchistes, les ultra droitistes, les islamistes modérés ou radicaux , les laïques, les libéraux et les sociaux démocrates ect… devant satisfaire uniquement les socles communs minimums, dont les personnalités rejetés et reconnus immorales appartenant à une justice indépendante de reconnaitre ou pas leur culpabilité. Certaines personnes s’autoproclament les sauveurs, alors que par le passé ils ont eu à gérer la société, ayant conduit le pays par le passé au rééchelonnement des années 1992/1995 et récemment 2000/2018 d’autres dans l’impasse actuelle, n’étant nullement mandatés par cet immense élan populaire. Pourtant, attention à ces slogans des courants extrémistes populistes, qui risquent de conduire Al HJirak dans l’impasse : « dégagez tous », la majorité des fonctionnaires, des cadres tant au niveau de la société civile que de l’ANP/forces de sécurité sont honnêtes, devant à tour prix éviter le vide des institutions ce qui conduirait à l’anarchie profitable aux conservateurs. Devant la gravité de la situation, le commandement de l’ANP a affirmé récemment que toutes les solutions sont ouvertes grâce au dialogue productif, pour trouver rapidement une issue à la crise, l’ANP, seule force organisée, qui devrait accompagner transitoirement cette période afin de revenir rapidement à ses missions constitutionnelles. Car seule l’ANP, la seule institution organisée a l’adhésion populaire, appartenant à la société de s’organiser en fonction d’affinités politiques et économiques, avec des propositions opérationnelles réalistes, pour être des interlocuteurs crédibles.
Cinquièmement, comme recommandé dans nos différentes contributions entre 1992/2019, s’insérant au sein d’un tableau de bord datés et d’une vison stratégique à moyen et long terme , par une refondation de l’Etat (démocratisation) , s’impose une nouvelle réorganisation institutionnelle des fonctions des ministères par des regroupements homogènes et des collectivités locales les mutant en collectivités locales manager créateur de richesses par une réelle décentralisation , regroupement homogènes au sein de cinq à sept éco- pôles régionaux, tenant compte des hauts plateaux, pilotés par des chambre de commerce régionales, un espace équilibré et solidaire afin de rapprocher l’Etat du citoyen. Dans ce cadre s’impose une nouvelle politique de l’habitat reposant sur l’efficacité énergétique (de nouvelles méthodes de construction économisant l’énergie) et une urbanisation maitrisée dans le cadre d’une nouvelle politique de l’aménagement du territoire rentrant dans le cadre des éco-pôles régionaux que j’ai suggérée depuis 2000.
Sixièmement, afin de réaliser la symbiose brisée entre les partis pouvoir et opposition –citoyens s’impose la production d’une culture politique participative, la réorganisation du système partisan, syndical et associatif qui ont de moins en moins d’impacts pour la mobilisation de la société et la promotion de la femme signe de la vitalité de toute société. Parallèlement, réorganiser le champ de l’information et de la communication pour plus de concurrence car l’information en ce XXIème siècle n’est plus le quatrième pouvoir mais le cœur du pouvoir passant par une communication institutionnelle efficiente, afin d’éviter les rumeurs dévastatrices.
Septièmement, la réforme de la justice par son indépendance, par l’application et l’adaptation du Droit tant par rapport aux mutations internes que du droit international. Une lutte, dans le cadre d’un Etat de Droit et de la totale transparence, contre le cancer de la bureaucratie et son appendice la corruption, à ne pas confondre avec acte de gestion, passant par la nécessaire intégration de la sphère informelle loin des mesures autoritaires bureaucratiques, représentant plus de 50% de la superficie économique et une profonde moralisation de la société. Pilier du développement du XXIème siècle, adapter le système éducatif, centre d’élaboration et de diffusion de la culture et de l’idéologie de la résistance au changement et à la modernisation du pays. Une nouvelle politique des nouvelles technologies l’avenir appartenant à l’intelligence artificielle et au digital qui modèleront à la fois la gestion des institutions étatiques centrales et locales, des entreprises et nos comportements.
Huitièmement, il s’agit de revoir la politique de la gestion des capitaux marchands de l’Etat évitant ces projets de prestige, ces assainissements répétés d’entreprises supportés par le trésor public, renforcer l’autonomie des entreprises publiques dans un cadre concurrentiel, la dynamisation du secteur privé et du partenariat public privé national et international créateur de richesses supposant de revoir impérativement la règle des 49/51% qui devrait s’appliquer qu’aux segments hautement stratégiques à définir, une minorité de blocage de 30% pour certains segments, laisser la libre entreprise pour d’autres et favoriser l’apport par des mesures incitatives de nos émigrés à l’étranger qui doivent impérativement contribuer au développement national. Et ce parallèlement à une politique clairement définie dans le temps de la transition énergétique (efficacité énergétique, hydrocarbures traditionnelles- énergies renouvelables, pétrole/gaz de schiste sous réserve de la protection de l’environnement) et du nouveau modèle de consommation énergétique, impliquant un nouveau management stratégique de Sonatrach et la nécessaire révision de la loi des hydrocarbures de 2013 inadaptée à la conjoncture actuelle ainsi qu’une nouvelle politique de protection de l’environnement qui constitue un coût supporté par le budget comme les maladies, la détérioration du cadre de vie , l’avenir appartenant aux activités économiques écologiques. Dans le cadre du sillage des priorités sectorielles, pays à fortes potentialités touristiques , avoir une politique attractive dans ce segments , redynamiser l’agriculture, tenant compte que l’Algérie est un pays semi-aride, par la révision du foncier agricole et une nouvelle politique de gestion de l’eau, cet or bleu qui risque de faire l’objet de guerres fratricides durant le XXIème siècle et concernant tous les continents, dont l’Afrique (le cas des eaux du Nil qui traverse plusieurs territoires pour l’Afrique est à méditer).
Neuvièmement, la réforme du système financier est un préalable essentiel à la relance de l’investissement public, privé national et étranger, les banques publiques et privées étant au cœur d’importants enjeux de pouvoir entre les partisans de l’ouverture et ceux de préservation des intérêts de la rente, ainsi qu’une gestion active de nos réserves de change. La réforme du système financier est considérée, à juste titre, comme l’indice le plus probant de la volonté politique de l’Algérie d’ouvrir ou non l’économie nationale à la libre entreprise. Il s’agit d’avoir une nouvelle politique des subventions ciblées pour les plus défavorisés, tant inter-socio-professionnelle qu’inter- régionale pour garantir la cohésion sociale. Ainsi qu’une nouvelle politique salariale et du marché de l’emploi conciliant flexibilité et sécurité, une nouvelle politique par la réunification des caisses de retraite afin d’éviter leur implosion, la solution étant le développement des segments productifs devant faire le bilan de tous ces organismes de l’emploi des jeunes qui doivent être unifiés, dont l’impact reste limité.
Dixièmement, la politique étrangère devra reposer sur des réseaux décentralisés de la société civile (ONG) et une redéfinition des missions des ambassades (résultat en fonction de l’allocation devises), la place de l’Algérie étant au sein de l’espace méditerranéen et africain. Tenant compte des nouvelles mutations géostratégiques mondiales, une révision de la politique de la défense/ sécurité intérieure /extérieure, s’adaptant aux nouvelles technologies, l’armement classique tenant à être déclassé, d’où l’importance de la formation adaptée (réseaux d’espionnage par satellites- attaque par drones, cybercriminalité, renseignement pour obtenir des marchés face à des concurrents agressifs, réseaux subversifs facteur de déstabilisation). Mais la garantie la plus sure de la sécurité d’un pays passe par la mobilisation de la population et la symbiose Etat-citoyens donc par la démocratisation tenant compte de notre anthropologie culturelle.
En résumé, comprendre la résistance aux réformes implique de saisir les tendances réelles de la société algérienne face tant aux mutations internes que mondiales, d’analyser avec lucidité les relations dialectiques réformes/démocratie/justice sociale/économie de marché concurrentielle dans le cadre des valeurs internationales, loin de tout monopole public ou privé et les segments de la production de la rente ( Sonatrach) et celui de sa redistribution ( (système financier), bouleversant des intérêts, les gagnants de demain n’étant pas forcément ceux d’aujourd’hui.
Or, le dialogue est l‘outil par excellence de la bonne gouvernance afin de réaliser les transformations politiques et économiques. Une longue période de transition que certains proposent, le temps ne se rattrapant jamais en économie, conduira à la régression économique et sociale avec des réserves de change tendant vers zéro et le retour au FMI dans deux ans. La stabilité et le développement sont conditionnés par de profondes réformes permettant un développement durable Le défit du futur de l’Algérie peut se résumer ainsi : soit une véritable stratégie d’adaptation à ce monde turbulent et instable, de profondes réformes afin de favoriser le développement durable ou une régression de l’Algérie tant dans le domaine économique, social, politique et militaire.
L’article Décryptage. Dix propositions pour une sortie urgente de la crise politique en Algérie est apparu en premier sur Algérie Part.
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